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30 janvier 2014 4 30 /01 /janvier /2014 14:10

La défaite politique de « Jour de colère »

Avec 17 000 participants recensés par la police au plus fort de l'après-midi, la manifestation "jour de colère", dimanche 26 janvier à Paris, a marqué les esprits. C'est la première fois depuis longtemps, qu'une extrême droite, pour le moins éclatée, mobilise autant. C'est encore la première fois depuis longtemps, que des slogans antisémites, négationnistes sont scandés de manière totalement assumée dans un défilé de cette importance. Sans compter les mots d'ordre violents visant les journalistes et les homosexuels.

C'est la première fois, enfin, que l'ultra-droite, dans ses composantes les plus radicales et les plus racistes, cohabite sans heurt dans un même cortège avec des militants plus métissés, issus de la "Dieudosphère", sous le mot d'ordre de "la liberté d'expression". Mais ce qui, à première vue, est apparu comme un succès de cette mouvance ressemble pourtant à une défaite politique. Que signifie cette mobilisation ? Doit-on y voir une mutation de l'extrême droite ?

Ce rassemblement était organisé par le Printemps français, étiquette sous laquelle sont réunis depuis près d'un an les éléments les plus radicaux anti-mariage pour tous. L'objectif était de faire "coaguler les colères" contre le pouvoir qui, dixit, "n’écoute pas le peuple, matraque les contribuables, enterre notre armée, libère les délinquants, déboussole nos enfants, pervertit notre système scolaire, réduit nos liberté, assassine notre identité, détruit nos familles".

Le Printemps français est, dans les faits, structuré par l'Action française (AF, maurrassiens), qui assure toute sa logistique et dont les locaux servent de base arrière. Antirépublicaine et antiparlementaire assumée, l'AF est depuis un an de toutes les actions coup-de-poing et a le vent en poupe.

Le défilé avait reçu le soutien d'une myriade d'associations, pour une part fantomatiques ou liées directement au Printemps français comme le collectif "Hollande dégage" de David van Helmerick , l'un des responsables du PF, le Collectif des avocats libres de Frédéric Pichon ou le Camping pour tous. Mais aussi de divers microgroupes antifiscalité.

Un défilé politiquement marqué

"Quand il y a le feu à la maison, on ne demande pas le CV du pompier", a expliqué Béatrice Bourges, porte-parole du Printemps français et figure centrale de ce "jour de colère" quelques temps avant le défilé. Et de fait, cette fameuse manifestation est devenue le point de rencontre et de jonction de toute la mouvance ultra. Et d'elle seule.

Peu de familles, presque pas d'enfants, une ambiance agressive, tendue et pesante. Et la volonté pour ces militants, dont certains n'hésitaient pas à faire référence à l'Ukraine, d'en découdre, comme ils l'avaient fait en 2013 lors des fins de cortège place des Invalides.

Les catholiques intégristes de Civitas ont ainsi amené avec eux depuis Lyon des activistes du Gud Lyon (proches du mouvement "philo-nazi" Terre et peuple) et des hooligans. Le Renouveau français, le Gud Paris, les anciens des Jeunesses nationalistes et de l'Oeuvre française – deux organisations dissoutes cet été – étaient également présents.

Si le FN n'appelait pas à cette manifestation et qu'aucun de ses cadres n'était là, un proche de Marine Le Pen, Axel Loustau, était de la partie, comme l'a relevé Mediapart.

Dieudonné avait appelé ses soutiens à participer au défilé. Il a été entendu. Son acolyte, le polémiste Alain Soral, patron d'Egalité et réconciliation, qui se revendique désormais "national-socialiste", avait aussi fait le déplacement avec un groupe d'environ 200 personnes. Certains d'entre-eux brandissaient des ananas – un signe de ralliement à Dieudonné et son chant "Shoahnanas".

La naissance d'un "bloc brun" ?

Dans son édition du 23 janvier, l'hebdomadaire d'extrême droite Minute prédisait pour ce "jour de colère" la formation d'un "Black Block droitier", composé "de hooligans, de patriotes ou de conservateurs énervés" ayant en commun "l'idée que l'on ne parvient pas à se faire entendre en étant sages et fustigeant la politique rose-bonbon de la Manif pour tous". Apparemment, Minute était bien renseigné puisqu'en fin de cortège plusieurs dizaines de personnes, encapuchonnés, le visage recouvert de foulards, ont constitué un tel bloc. Il faut dire que les Nationalistes autonomes avaient appelé leurs troupes à rejoindre le défilé.

Visuel diffusé sur les réseaux sociaux

Place Vauban, après la dispersion, ils ont affronté les forces de l'ordre avec le renfort de jeunes pro-Dieudonné. En tout, quelques trois cents personnes. Chose inédite, ces deux groupes n'étant ni sociologiquement, ni politiquement semblables. Seuls points d'accord : la "baston" et la haine des juifs.

La fuite des "modérés", l'échec politique de "jour de colère"

La physionomie de cette manifestation, les violences de la soirée ont, après-coup, eu un effet repoussoir. Ceux qui en 2013 fustigeaient "la répression" des fins de "Manif pour tous" n'ont aujourd'hui pas de mots assez durs pour condamner "jour de Colère". Il en va ainsi d'Ivan Rioufol, chroniqueur du Figaro, qui résume bien l'état d'esprit. "'Jour de colère' a dévoilé la face hideuse d’un France fascistoïde. Il est l‘exemple à ne plus suivre", écrit notamment le journaliste dans un billet.

Car là est bien la défaite politique de "jour de colère". Il est apparu pour ce qu'il a toujours été : un défilé bric-à-brac d'extrême droite radicale et non le soit-disant mouvement citoyen apolitique et indépendant qu'il prétendait incarner.

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